Le débat se dichotomise très vite lorsque des parents parlent ensemble de leurs attitudes éducatives. Il y a les optimistes, quelque peu rêveurs, qui pensent que l’enfant va épanouir son potentiel si on le laisse faire et les éducateurs actifs, quelque peu dirigistes, qui définissent, pour l’enfant, les choses, qu’elles soient attendues ou exigées. Si tous on raison, ce qui reste compliqué, c’est le dosage des deux formules. À force de voir des enfants délurés et exigeants, on en oublierait que les adultes ont encore leur mot à dire. À force de voir des enfants revendicateurs et intolérants à la frustration, on en reviendrait à rêver aux cohortes d’enfants sages et bien formatés d’il y a une cinquantaine d’années.
Si le climat éducatif et social a bien changé, un enfant reste un enfant et ses besoins restent les mêmes en matière de développement: cerner le monde qui l’entoure.

  • Le tout-petit a besoin de percevoir invariablement que ses pleurs, ses appels, ses malaises seront entendus et compris, et qu’on y répondra.
  • À 18 mois-2 ans, il a besoin de sentir un adulte qui a clairement une fonction de guide à ses côtés, dans le petit monde social qui s’ouvre à lui.
  • Autour 3 ans, il a besoin qu’on porte intérêt au déploiement de ses pensées, tout en le rassurant par des comportements cohérents quand ces pensées sont génératrices d’angoisses.
  • Vers 6-7 ans, il a besoin qu’on lui ouvre l’espace du symbolique: le réel peut être représenté par des signes, des symboles (par exemple, l’écriture) et de la réflexion abstraite;
  • À 12-13 ans, il a besoin de sentir de la résistance face à ses attaques et d’avoir une présence pour défricher avec lui les émois nouveaux qu’il éprouve.

L’école, une alliée

Grandir, c’est apprendre à tenir compte des autres, à s’ajuster aux règles en cours, à inhiber ses débordements, à accéder au monde des idées, à activer sa curiosité pour ce qui se passe autour de soi, à échanger avec autrui en se décentrant pour rejoindre l’autre. Grandir, c’est osciller entre une adaptation au monde des autres et une préservation de ce qui est si singulier en soi.
Certains parents vivent le monde extérieur comme une menace contre la personnalité de leur enfant, en ce sens que ce monde pourrait le métamorphoser malgré lui. L’école, la société sont à combattre. La sensation de devoir protéger l’enfant d’un engloutissement dans le collectif empêche les partenariats avec autrui, rend suspecte toute position dirigiste et risque ainsi d’entraîner l’enfant dans l’étourdissement de la toute-puissance. C’est oublier que l’humain ne se crée pas tout seul, ne s’auto-construit pas. L’humain se nourrit des apports des autres, s’édifie en s’appuyant sur les autres. Il doit donc s’adapter à l’autre, tolérer l’autre, se décentrer pour faire place à l’autre, assimiler les codes qui permettent la vie avec les autres. Le petit enfant n’apprend pas cela seul: il a besoin des autres – à commencer par ses parents qui lui montrent le chemin – pour s’ouvrir au monde des autres, à savoir son environnement.